Faites connaissance avec les habitants des sols de votre jardin avec le nouvel observatoire de la qualité biologique des sols !
Son nom et le logo parlent d’eux-mêmes : un cube, une portion de terre en trois dimensions renfermant un monde obscur où évolue cette faune mal connue et pourtant garante de la qualité du sol. A travers deux protocoles vous partez à la rencontre des espèces des parcs et jardins sous vos pieds et de façon ludique et très accessible.
Mettre en lumière la biodiversité souterraine
Les vers de terre et les cloportes ne jouissent pas de la même aura que les oiseaux, les abeilles ou les papillons. On se préoccupe moins de leur situation alors que ce monde souterrain joue un rôle essentiel dans les écosystèmes et rend des services considérables : fertilité des sols, stockage du carbone, stockage et purification de l’eau ou encore prévention de l’érosion. Malheureusement sous nos pieds, la situation n’est guère plus reluisante qu’à la surface : la biodiversité des sols subit de multiples agressions du fait de l’artificialisation des terres, de certaines pratiques agricoles (labour profond, usage intensif d’intrants chimiques, …) et du changement climatique.
Malgré son importance dans le fonctionnement des écosystèmes, nous savons finalement peu de chose sur l’état de la biodiversité des sols, pour comprendre sa distribution dans l’espace et dans le temps. Mobiliser un maximum de volontaires pour contribuer à faire avancer les connaissances sur ces invertébrés qui renseignent sur l’état des sols, tel est l’enjeu de QUBS !
Les chercheurs attendent impatiemment de pouvoir travailler sur ces précieuses données. Elles permettront d’étudier à grande échelle l’effet de certains facteurs comme les modes d’occupation du sol ou les pratiques de gestion.
La complexité des interactions, la diversité des espèces et des rôles fonctionnels exigent de s’appuyer sur diverses mesures pour évaluer la santé d’un sol. Chaque participant aura ainsi sa petite mallette à disposition. Si tous les indicateurs sont au vert, il y a de forte chance que le paradis règne sous vos semelles. A vous de voir ensuite comment cette faune évolue dans le temps, et d’adapter vos pratiques si besoin. Une bonne occasion enfin de découvrir la diversité de ces espèces, dont la plupart sont invisibles depuis l’extérieur ou nécessite de se mettre à plat ventre sur la pelouse. Chose qui n’arrive pas tous les jours, on en conviendra.
Un développement participatif
A l’origine de cet observatoire, un vaste projet de recherche : BISES (Biodiversité des sols urbains) financé par l’Agence de nationale de la recherche, porté par le Centre d’Écologie Fonctionnelle et Évolutive (CEFE) de Montpellier et impliquant 7 laboratoires de recherche et une association (Plante & Cité). Son objectif étant « d’accroitre la connaissance de la biodiversité des sols urbains et son influence sur les fonctions et services écosystémiques rendus par ces derniers. ». Dans ce cadre, plusieurs partenaires [1] ont pris en charge le volet participatif. « Nous avons passé l’année 2020 à définir les contours et les objectifs du programme, explique Sandra Barantal, chercheuse en écologie des sols à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3 et co-animatrice du projet. Nous avons dès le début exclu l’observation directe des microorganismes car cela demandait trop de matériel. Nous voulions que les protocoles soient accessibles à tous et applicables chez soi. »
Fin 2020, une phase de test réunissant onze protocoles différents est lancée et diffusée via PartiCItae. L’objectif ? Impliquer le public dans le choix et l’amélioration des protocoles. « On a repris certains protocoles existants de l’OPVT (Observatoire participatif des vers de terre), de Jardibiodiv et on a développé de nouveaux protocoles avant de les soumettre aux participants. » explique Sandra.
Suite à cette sollicitation, une trentaine de personnes ont joué le jeu : enseignants, animateurs, élèves de lycées agricoles, familles et amis volontaires ont suivi scrupuleusement les différentes feuilles de route dans leurs jardins respectifs. "Nous avons eu des retours constructifs ! » se réjouit Sandra. « Les échanges avec tous ces participants ont permis de comprendre ce qui fonctionnait, d’identifier certains blocages. Finalement nous avons retenus les protocoles les plus attractifs ». Fut par exemple différé « l’appât à collembole », protocole séduisant à première vue, qui consistait à déposer un mélange de farine et de fécule sur des bâtonnets de glace et de les planter dans la terre pour mesurer l’activité de dégradation de la matière organique. « Le bâton se cassait trop souvent. On a besoin de redéfinir le matériel ». Parmi les neufs protocoles retoqués, certains rejoindront probablement l’observatoire dans un second temps après révision.
Comment participer ?
Voici donc les deux protocoles retenus, à mettre en place dans le jardin, le potager, une friche, une cour d’école, dans un espace vert quelconque à condition de décrire un minimum le site (mode d’occupation, végétation etc.). Deux manip’ qui se déroulent en trois temps : la collecte, la prise de photo et l’identification. Avec bien-sûr transmission des données sur le site. Seule la première étape – le mode de capture – change suivant le protocole.
1 – le protocole Noctambules. Après avoir creusé un petit trou dans la terre, déposez un gobelet avec un coton humide au fond. Le bord du gobelet doit s’arrêter au niveau de la surface. Laissez ensuite le dispositif toute une nuit le temps que les organismes tombent dans le piège. Un cliché par spécimen et à eux la liberté. Ce protocole cible surtout les grosses bestioles mobiles comme les cloportes, mille-pattes, araignées, coléoptères les punaises etc.
2 – le protocole Aspifaune. Premier défi : confectionner un petit aspirateur à bouche avec deux tuyaux souples d’aquarium (9mm de diamètre), un bocal hermétique et de la gaze de coton. Il s’agît ensuite d’aspirer tout ce qui évolue sur le sol sur une surface de 25cm par 25 cm, ceci pendant exactement 7 minutes. Comme pour le précédent, on termine par une séance photos.
Après avoir rendu sa liberté à toute cette petite faune, photos en boîte, les choses sérieuses commencent. Place à l’identification. Ne paniquez pas devant ce trombinoscope certainement composé d’animaux totalement inconnus ! Une clé de détermination est là pour vous guider permettant de reconnaître 400 espèces ou groupes d’espèces différents. « On ne demande pas toujours d’aller jusqu’à l’espèce, parfois très difficiles à déterminer sur les photos de certains groupes », précise Sandra.
A terme, de nouveaux protocoles intègreront l’observatoire afin d’étudier toutes les dimensions de ce monde méconnu : la faune sous-terraine, la dégradation de la matière organique, une mesures des qualités physico-chimiques du sol… Bref, vous n’êtes pas sorti du Qubs ! Rendez-vous dès à présent pour les premiers relevés.
[1] Les partenaires :
- Université Paul-Valéry Montpellier 3 – Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive
- Muséum National d’Histoire Naturelle, avec l’équipe Vigie Nature
- Sorbonne Université, avec l’observatoire Particitae
- Université de Lorraine – INRAE, Laboratoire Sol Environnement
- Mosaic – Méthodes et outils pour les sciences participatives (MNHN, Sorbonne Université)
- Plante & Cité
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